Saddam Hussein
Saddam Hussein Abd al-Majid al-Tikriti : 28 avril 1937- 30 décembre 2006.
Au début des années 1970, Saddam Hussein se donne le titre de général honoraire. Le 1er juin 1972 il commence une vaste nationalisation des compagnies pétrolières monopolistes qui se trouvaient jusque-là entre des mains étrangères. L'Irak connaîtra alors un développement industriel et social sans précédent. Saddam Hussein s'efforce de moderniser l'économie et l'industrie. En 1973, il devient général, et en 1979, à 42 ans, se sentant assez puissant, il succède à Ahmad Hasan al-Bakr et devient président de la République d'Irak, suite au renoncement « précipité » de son prédécesseur, officiellement pour « raison de santé ». Des milliers de cadres du parti Baas sont alors convoqués d'urgence et vingt-deux d'entre eux, accusés de trahison, sont arrêtés en pleine assemblée présidée par Saddam Hussein fumant le cigare et pleurant parfois, et sont emmenés à l'extérieur pour être exécutés sommairement. La scène est filmée et est suivie en direct dans tout le monde arabe ; elle servira à asseoir le pouvoir du nouveau dictateur en Irak et deviendra célèbre mondialement comme illustration de ses méthodes et de sa personnalité.
En 1979, à sa prise de pouvoir, Saddam Hussein se nomme maréchal et commandant en chef des forces armées. Durant les trente-cinq années de son pouvoir, il va utiliser tous les moyens possibles pour contrôler la population et régner sans partage. Comme tous les régimes totalitaires, la propagande est omniprésente à travers les différents médias et les affiches représentant le portrait du rais alimentent un culte de personnalité. La presse est censurée, tandis que la peur d'être arrêté et exécuté paralyse les opposants (une simple offense faite au chef d'État étant même légalement passible de la peine capitale), puisque les agents des services de renseignements sont partout, et la délation étant également monnaie courante.
Saddam Hussein use aussi de népotisme (tendance à favoriser l'ascension de leur famille ou leur entourage dans la hiérarchie pour asseoir son pouvoir personnel). Ainsi plusieurs proches issus de son « clan » (fils, frères, demi-frères, oncles, cousins, etc.) nés souvent dans la même ville que lui à Tikrit, sont placés à des hauts postes de responsabilité, notamment au sein de l'armée et des services secrets (la Mukhabarat).
Néanmoins, cela n'empêche pas le dictateur faire régner un véritable climat de terreur au sein même de sa propre famille. Ainsi, il n'hésite pas à faire exécuter à leur retour d'exil de Jordanie, ses deux gendres qui étaient alors entrés en dissidence, les frères Hussein et Saddam Kamel, époux respectifs de Raghad et Rana. Il leur avait promis auparavant sa clémence si ceux-ci rentraient dans le rang (des menaces du Raïs sur la vie de leurs proches ayant probablement convaincus également les deux hommes de rentrer en Irak, ce qui n'empêchera pas que leurs père, mère et sœurs soient exécutés par la suite dans la maison familiale).
La prison d'Abu Ghraib est symbolique de l'arbitraire du régime. Les témoins rapportent que les cellules étaient de dimensions réduites (4 × 6 mètres). Elles n'étaient dotées ni d'eau courante, ni de toilettes. Les prisonniers, des opposants au régime, majoritairement des islamistes chiites pro-iraniens, s'entassaient à plusieurs dans ces pièces sans confort. Certains furent exécutés pour « activités religieuses ». Saddam Hussein a échappé à plusieurs attentats ou tentatives de renversement par la force.
Dans le même temps, d'énormes progrès au niveau social auront été accomplis sous sa présidence. L'Irak s'industrialise rapidement et devient l'un des pays arabes où le niveau de vie est le plus élevé, avec comme résultat l'émergence d'une véritable classe moyenne.
En 1973, Saddam lance la « Campagne nationale pour l'éradication de l'illettrisme » un plan ambitieux visant à lutter contre l'analphabétisme. L'école devient gratuite, obligatoire et séculière pour les garçons et les filles. En moins de dix-huit mois, le nombre d'enseignants atteint le nombre de soixante-deux mille personnes, par ailleurs le nombre de filles scolarisées est multiplié par trois. L'Unicef reconnaît que l'Irak a pratiquement éradiqué l'illettrisme et aura poussé la scolarisation des Irakiens à un niveau encore inédit au Moyen-Orient. En 1982, l'Unesco remet un trophée à l'Irak pour l'effort d'alphabétisation dont avait fait preuve le gouvernement à l'égard des filles. Près de 95 % des filles étaient scolarisées.
En 1977, 70 % des pharmaciens et 46 % des dentistes étaient des femmes. Par ailleurs, une élite intellectuelle et scientifique voit rapidement le jour. De par sa jeunesse difficile, il souhaitait que tout le pays sache lire et écrire, car pour lui l'éducation gratuite était un pas de plus vers l'égalité.
Dans son esprit, l'éducation gratuite concerne aussi bien l'accès à l'école en elle-même, que l'obtention de livres scolaires et la gratuité des moyens de transport. C'est pour cette raison que dans les années 1970 et 1980, le ministère de l'éducation irakien distribue tous les outils nécessaires à une bonne éducation. Les élèves pouvaient se rendre à l'école grâce à des bus qui étaient gratuits, et à la fin de leur année scolaire, tous les élèves recevaient un cadeau, comme des montres pour les collégiens et les lycéens. Les frais d'hospitalisation sont dorénavant pris en charge par l'État et des subventions sont accordées aux fermiers. Le système de santé irakien devient l'un des plus modernes et efficaces de tout le monde arabe ; les services publics ne sont pas en reste, car le recrutement se fait dorénavant sur le mérite.
L'Irak dépendant grandement du pétrole, Saddam tenta de diversifier l'économie en menant un plan d'industrialisation. L'Irak devient donc le premier État arabe à avoir utilisé sa rente pétrolière pour procéder à son industrialisation. Il entreprend la construction de routes, de grands axes autoroutiers et des bâtiments ainsi que le développement d'industries.
Il lance une révolution énergétique, amenant l'électrification de presque toutes les villes d'Irak (même les villes se situant dans les campagnes ou difficile d'accès). Près de dix mille villages ont été électrifiés en même temps. Par ailleurs, il fait distribuer gratuitement aux Irakiens des réfrigérateurs et des téléviseurs.
Avant les années 1970, l'Irak était un pays largement rural ; suite aux différentes réformes, l'urbanisation s'étend. Saddam redistribue les terres aux paysans, qui étaient auparavant dans les mains d'une minorité de personnes. Il lance une réforme agraire devant permettre aux fermiers de maximiser le profit de leur exploitation. L'agriculture est donc mécanisée, et les paysans ne sachant pas utiliser les nouvelles machines sont formés par le gouvernement. Cette réforme avait également comme but de mettre fin au féodalisme.
Il lance également une véritable politique culturelle, il réhabilite et entretient les anciens palais datant de l'Empire Abbasside, l'ancienne cité de Babylone, les palais de Nabuchodonosor, la triple enceinte ainsi que la porte d'Ishtar à Babylone. Il fonde plusieurs musées à Bagdad en vue de rassembler et de conserver le patrimoine historique irakien.
En 1980, l'Irak était le seul pays arabe en passe d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. D'ailleurs sa politique de modernisation ne s'arrêtait pas à l'Irak, car voulant la modernisation du monde arabe, il lance le Fonds national pour le développement extérieur. Il propose que l'augmentation du prix du brut, soit, en partie, consacrée à aider les États arabes les plus pauvres par l'intermédiaire d'un fonds de répartition. Cette proposition est saluée par les citoyens des pays arabes, mais elle est immédiatement rejetée par les émirs du Golfe.
Saddam Hussein avait comme rêve de restaurer le vieil empire babylonien, la grandeur de l'antique Mésopotamie et le rayonnement de l'empire abbasside. De fait, son projet s'intégrait dans le cadre plus global du projet de « Renaissance du monde arabo-musulman », idée centrale autour de laquelle s'articulent la quasi totalité les projets politiques du monde arabo-musulman depuis le début du vingtième siècle (à l'exception des communistes, souvent d'origines chiites, mais très minoritaires, sauf, peut-être, en Syrie et en Iran dans les milieux enseignants et, plus généralement, intellectuels, voire, en Iran, aristocratiques). Idée centrale qui permet de mieux comprendre les événements du monde arabo-musulman contemporain, les idées de conservatisme, de libéralisme, de socialisme ou, même, de dictature ou de démocratie (ce qui ne veut pas dire que les habitants de ces régions ne soient pas sensibles au respect de certaines libertés individuelles, dont la liberté religieuse ne fait toutefois pas encore partie), telles que conçus dans l'Union européenne ou aux États-Unis, étant encore parfaitement secondaires au Moyen-Orient (à l'importante exception d'Israël).
En Irak en particulier, c'est toute l'histoire de la Mésopotamie préislamique qui a été mise en valeur, avec les grands empires de l'antiquité irakienne, sumérien, akkadien, babylonien et ninivite, les sites archéologiques de Babylone et de Ninive ayant fait l'objet de restaurations grandioses. Le fait que la civilisation sumérienne soit la première de toutes les civilisations humaines, plus vieille de plusieurs siècles que celle de l'Égypte, et que la première écriture y ait été inventée, ne pouvait, aux yeux de Saddam Hussein, que flatter l'orgueil national du peuple irakien et, sous le régime, une place très large était accordée dans les livres scolaires d'histoire à l'histoire préislamique de l'Irak, de manière à essayer de développer une conscience nationale irakienne qui soit plus fondée sur l'idée de patrie que sur l'idée de religion.
Cette volonté de vouloir créer une conscience nationale distincte de la conscience religieuse s'est heurtée à une très violente hostilité des sunnites salafistes et des chiites, communautés au sein desquelles se sont développés de très nombreux groupes islamistes salafistes et chiites, interdits et pourchassés impitoyablement par le régime, comme l'étaient aussi les Kurdes indépendantistes, un régime nationaliste pouvant à la rigueur tolérer l'autonomie d'une province mais, en aucun cas, son indépendance. Les militants du parti communiste irakien, interdit lui aussi sous tous les régimes baasistes ayant connu l'Irak, furent également inquiétés mais, semble-t-il, beaucoup moins durement qu'en Iran ou en Égypte, probablement parce qu'ils n'ont jamais tenté, contrairement aux islamistes, d'attenter à la vie de Saddam Hussein, ou de provoquer des émeutes ou des insurrections, peut-être également parce qu'ils luttaient, eux-aussi, contre l'extrémisme religieux.
Un autre aspect de la mythologie qu'a essayé de forger Saddam Hussein s'appuyait sur Saladin, le héros (kurde, et né, comme Saddam Hussein, à Tikrit) mythique pour tous les musulmans, qui avait vaincu les Croisés, s'était emparé du Royaume chrétien de Jérusalem et avait mis en échec la Troisième croisade, héros comme l'ont été, dans l'Europe chrétienne, Charles Martel et Charlemagne, qui avaient stoppé les invasions musulmanes venant d'Espagne. Saddam Hussein ne négligeait pas non plus d'accorder une certaine place à l'empire abbasside, qui correspond à l'apogée de la civilisation arabo-musulmane, dont évidemment tous les irakiens musulmans et, plus généralement, tous les Arabes restent très fiers.
Saddam Hussein souhaitait voir exister un État arabe capable de rivaliser avec l'État d'Israël au point de vue économique, social, politique et militaire. À cet égard, et quoi que l'on puisse en penser, la disposition par l'Irak, comme c'est le cas pour Israël, de l'arme nucléaire était un facteur clé pour que l'Irak (et, bien sûr, en conséquence, Saddam Hussein lui-même) soit reconnue, par les États arabes comme par l'opinion publique arabe, comme le leader incontesté du monde arabe, après que le projet de République arabe unie eut fait long feu. Il n'est d'ailleurs pas impossible que la volonté des États-Unis de s'opposer à ce que l'Irak, qui y travaillait activement, possède l'arme nucléaire ait été la cause principale du déclenchement de la guerre du Golfe de 1991.
Après que l'Égypte eut renoncée, avec l'arrivée au pouvoir de Mohammed Hosni Moubarak, à jouer ce rôle, l'Irak baasiste a essayé de reprendre le flambeau, et Saddam Hussein a certainement rêvé d'être celui que l'Histoire du monde arabe retiendrait pour les siècles à venir comme ayant été l'artisan de la « Renaissance arabe ». Il revendiquait un destin prestigieux pour l'Irak, voulant faire de son pays un État fort, première puissance militaire et technologique de la grande « Nation arabe », au besoin par le fer et par le feu.
Non-intervention internationale
Sous la direction de Saddam Hussein, l'Irak devient une puissance régionale, en partie grâce aux revenus du pétrole et au soutien à la fois des pays occidentaux et du Bloc de l'Est, mais bénéficiera également du support idéologique des partis socialistes affiliés à la IIe internationale, qui voient dans le parti Baas l'un des porte-paroles d'une prise de conscience socialiste dans les pays du tiers monde, voulant se réapproprier leurs ressources énergétiques dans une démarche « progressiste » et « anti-colonialiste ». Après la révolution islamique d'Iran qui isole diplomatiquement ce pays, l'Irak est perçu par l'Occident comme une force stabilisatrice pour la région, un barrage territorial et humain qui peut et sera utilisé pour barrer la route aux islamistes vers les richesses de la « corne arabique ».
L'Irak bénéficie alors d'un large soutien international et des pays comme la France et les États-Unis (qui espéraient affaiblir le régime islamiste iranien et ainsi favoriser sa chute) lui fournissent en grande quantité armes et technologies, l'URSS restant toutefois le premier fournisseur d'armement. Le Raïs, qui se prend pour le nouveau Saladin et qui rêve de prendre la tête du monde arabe par la conquête militaire, est sacré champion de l'Occident. Les Nations unies n'ont jamais enquêté sur les crimes de Saddam Hussein car il était impossible de violer les principes de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un État. Aucune aide internationale ne vint soutenir les victimes kurdes des gazages et de la politique d'extermination.
La prise de pouvoir
Au début des années 1970, Saddam Hussein se donne le titre de général honoraire. Le 1er juin 1972 il commence une vaste nationalisation des compagnies pétrolières monopolistes qui se trouvaient jusque-là entre des mains étrangères. L'Irak connaîtra alors un développement industriel et social sans précédent. Saddam Hussein s'efforce de moderniser l'économie et l'industrie. En 1973, il devient général, et en 1979, à 42 ans, se sentant assez puissant, il succède à Ahmad Hasan al-Bakr et devient président de la République d'Irak, suite au renoncement « précipité » de son prédécesseur, officiellement pour « raison de santé ». Des milliers de cadres du parti Baas sont alors convoqués d'urgence et vingt-deux d'entre eux, accusés de trahison, sont arrêtés en pleine assemblée présidée par Saddam Hussein fumant le cigare et pleurant parfois, et sont emmenés à l'extérieur pour être exécutés sommairement. La scène est filmée et est suivie en direct dans tout le monde arabe ; elle servira à asseoir le pouvoir du nouveau dictateur en Irak et deviendra célèbre mondialement comme illustration de ses méthodes et de sa personnalité.
Les caractéristiques de la dictature irakienne
En 1979, à sa prise de pouvoir, Saddam Hussein se nomme maréchal et commandant en chef des forces armées. Durant les trente-cinq années de son pouvoir, il va utiliser tous les moyens possibles pour contrôler la population et régner sans partage. Comme tous les régimes totalitaires, la propagande est omniprésente à travers les différents médias et les affiches représentant le portrait du rais alimentent un culte de personnalité. La presse est censurée, tandis que la peur d'être arrêté et exécuté paralyse les opposants (une simple offense faite au chef d'État étant même légalement passible de la peine capitale), puisque les agents des services de renseignements sont partout, et la délation étant également monnaie courante.
Saddam Hussein use aussi de népotisme (tendance à favoriser l'ascension de leur famille ou leur entourage dans la hiérarchie pour asseoir son pouvoir personnel). Ainsi plusieurs proches issus de son « clan » (fils, frères, demi-frères, oncles, cousins, etc.) nés souvent dans la même ville que lui à Tikrit, sont placés à des hauts postes de responsabilité, notamment au sein de l'armée et des services secrets (la Mukhabarat).
Néanmoins, cela n'empêche pas le dictateur faire régner un véritable climat de terreur au sein même de sa propre famille. Ainsi, il n'hésite pas à faire exécuter à leur retour d'exil de Jordanie, ses deux gendres qui étaient alors entrés en dissidence, les frères Hussein et Saddam Kamel, époux respectifs de Raghad et Rana. Il leur avait promis auparavant sa clémence si ceux-ci rentraient dans le rang (des menaces du Raïs sur la vie de leurs proches ayant probablement convaincus également les deux hommes de rentrer en Irak, ce qui n'empêchera pas que leurs père, mère et sœurs soient exécutés par la suite dans la maison familiale).
La prison d'Abu Ghraib est symbolique de l'arbitraire du régime. Les témoins rapportent que les cellules étaient de dimensions réduites (4 × 6 mètres). Elles n'étaient dotées ni d'eau courante, ni de toilettes. Les prisonniers, des opposants au régime, majoritairement des islamistes chiites pro-iraniens, s'entassaient à plusieurs dans ces pièces sans confort. Certains furent exécutés pour « activités religieuses ». Saddam Hussein a échappé à plusieurs attentats ou tentatives de renversement par la force.
Modernisation de l'Irak
Dans le même temps, d'énormes progrès au niveau social auront été accomplis sous sa présidence. L'Irak s'industrialise rapidement et devient l'un des pays arabes où le niveau de vie est le plus élevé, avec comme résultat l'émergence d'une véritable classe moyenne.
En 1973, Saddam lance la « Campagne nationale pour l'éradication de l'illettrisme » un plan ambitieux visant à lutter contre l'analphabétisme. L'école devient gratuite, obligatoire et séculière pour les garçons et les filles. En moins de dix-huit mois, le nombre d'enseignants atteint le nombre de soixante-deux mille personnes, par ailleurs le nombre de filles scolarisées est multiplié par trois. L'Unicef reconnaît que l'Irak a pratiquement éradiqué l'illettrisme et aura poussé la scolarisation des Irakiens à un niveau encore inédit au Moyen-Orient. En 1982, l'Unesco remet un trophée à l'Irak pour l'effort d'alphabétisation dont avait fait preuve le gouvernement à l'égard des filles. Près de 95 % des filles étaient scolarisées.
En 1977, 70 % des pharmaciens et 46 % des dentistes étaient des femmes. Par ailleurs, une élite intellectuelle et scientifique voit rapidement le jour. De par sa jeunesse difficile, il souhaitait que tout le pays sache lire et écrire, car pour lui l'éducation gratuite était un pas de plus vers l'égalité.
Dans son esprit, l'éducation gratuite concerne aussi bien l'accès à l'école en elle-même, que l'obtention de livres scolaires et la gratuité des moyens de transport. C'est pour cette raison que dans les années 1970 et 1980, le ministère de l'éducation irakien distribue tous les outils nécessaires à une bonne éducation. Les élèves pouvaient se rendre à l'école grâce à des bus qui étaient gratuits, et à la fin de leur année scolaire, tous les élèves recevaient un cadeau, comme des montres pour les collégiens et les lycéens. Les frais d'hospitalisation sont dorénavant pris en charge par l'État et des subventions sont accordées aux fermiers. Le système de santé irakien devient l'un des plus modernes et efficaces de tout le monde arabe ; les services publics ne sont pas en reste, car le recrutement se fait dorénavant sur le mérite.
L'Irak dépendant grandement du pétrole, Saddam tenta de diversifier l'économie en menant un plan d'industrialisation. L'Irak devient donc le premier État arabe à avoir utilisé sa rente pétrolière pour procéder à son industrialisation. Il entreprend la construction de routes, de grands axes autoroutiers et des bâtiments ainsi que le développement d'industries.
Il lance une révolution énergétique, amenant l'électrification de presque toutes les villes d'Irak (même les villes se situant dans les campagnes ou difficile d'accès). Près de dix mille villages ont été électrifiés en même temps. Par ailleurs, il fait distribuer gratuitement aux Irakiens des réfrigérateurs et des téléviseurs.
Avant les années 1970, l'Irak était un pays largement rural ; suite aux différentes réformes, l'urbanisation s'étend. Saddam redistribue les terres aux paysans, qui étaient auparavant dans les mains d'une minorité de personnes. Il lance une réforme agraire devant permettre aux fermiers de maximiser le profit de leur exploitation. L'agriculture est donc mécanisée, et les paysans ne sachant pas utiliser les nouvelles machines sont formés par le gouvernement. Cette réforme avait également comme but de mettre fin au féodalisme.
Il lance également une véritable politique culturelle, il réhabilite et entretient les anciens palais datant de l'Empire Abbasside, l'ancienne cité de Babylone, les palais de Nabuchodonosor, la triple enceinte ainsi que la porte d'Ishtar à Babylone. Il fonde plusieurs musées à Bagdad en vue de rassembler et de conserver le patrimoine historique irakien.
En 1980, l'Irak était le seul pays arabe en passe d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. D'ailleurs sa politique de modernisation ne s'arrêtait pas à l'Irak, car voulant la modernisation du monde arabe, il lance le Fonds national pour le développement extérieur. Il propose que l'augmentation du prix du brut, soit, en partie, consacrée à aider les États arabes les plus pauvres par l'intermédiaire d'un fonds de répartition. Cette proposition est saluée par les citoyens des pays arabes, mais elle est immédiatement rejetée par les émirs du Golfe.
Son rêve d'un « Nouvel Empire babylonien »
Saddam Hussein avait comme rêve de restaurer le vieil empire babylonien, la grandeur de l'antique Mésopotamie et le rayonnement de l'empire abbasside. De fait, son projet s'intégrait dans le cadre plus global du projet de « Renaissance du monde arabo-musulman », idée centrale autour de laquelle s'articulent la quasi totalité les projets politiques du monde arabo-musulman depuis le début du vingtième siècle (à l'exception des communistes, souvent d'origines chiites, mais très minoritaires, sauf, peut-être, en Syrie et en Iran dans les milieux enseignants et, plus généralement, intellectuels, voire, en Iran, aristocratiques). Idée centrale qui permet de mieux comprendre les événements du monde arabo-musulman contemporain, les idées de conservatisme, de libéralisme, de socialisme ou, même, de dictature ou de démocratie (ce qui ne veut pas dire que les habitants de ces régions ne soient pas sensibles au respect de certaines libertés individuelles, dont la liberté religieuse ne fait toutefois pas encore partie), telles que conçus dans l'Union européenne ou aux États-Unis, étant encore parfaitement secondaires au Moyen-Orient (à l'importante exception d'Israël).
En Irak en particulier, c'est toute l'histoire de la Mésopotamie préislamique qui a été mise en valeur, avec les grands empires de l'antiquité irakienne, sumérien, akkadien, babylonien et ninivite, les sites archéologiques de Babylone et de Ninive ayant fait l'objet de restaurations grandioses. Le fait que la civilisation sumérienne soit la première de toutes les civilisations humaines, plus vieille de plusieurs siècles que celle de l'Égypte, et que la première écriture y ait été inventée, ne pouvait, aux yeux de Saddam Hussein, que flatter l'orgueil national du peuple irakien et, sous le régime, une place très large était accordée dans les livres scolaires d'histoire à l'histoire préislamique de l'Irak, de manière à essayer de développer une conscience nationale irakienne qui soit plus fondée sur l'idée de patrie que sur l'idée de religion.
Cette volonté de vouloir créer une conscience nationale distincte de la conscience religieuse s'est heurtée à une très violente hostilité des sunnites salafistes et des chiites, communautés au sein desquelles se sont développés de très nombreux groupes islamistes salafistes et chiites, interdits et pourchassés impitoyablement par le régime, comme l'étaient aussi les Kurdes indépendantistes, un régime nationaliste pouvant à la rigueur tolérer l'autonomie d'une province mais, en aucun cas, son indépendance. Les militants du parti communiste irakien, interdit lui aussi sous tous les régimes baasistes ayant connu l'Irak, furent également inquiétés mais, semble-t-il, beaucoup moins durement qu'en Iran ou en Égypte, probablement parce qu'ils n'ont jamais tenté, contrairement aux islamistes, d'attenter à la vie de Saddam Hussein, ou de provoquer des émeutes ou des insurrections, peut-être également parce qu'ils luttaient, eux-aussi, contre l'extrémisme religieux.
Un autre aspect de la mythologie qu'a essayé de forger Saddam Hussein s'appuyait sur Saladin, le héros (kurde, et né, comme Saddam Hussein, à Tikrit) mythique pour tous les musulmans, qui avait vaincu les Croisés, s'était emparé du Royaume chrétien de Jérusalem et avait mis en échec la Troisième croisade, héros comme l'ont été, dans l'Europe chrétienne, Charles Martel et Charlemagne, qui avaient stoppé les invasions musulmanes venant d'Espagne. Saddam Hussein ne négligeait pas non plus d'accorder une certaine place à l'empire abbasside, qui correspond à l'apogée de la civilisation arabo-musulmane, dont évidemment tous les irakiens musulmans et, plus généralement, tous les Arabes restent très fiers.
Saddam Hussein souhaitait voir exister un État arabe capable de rivaliser avec l'État d'Israël au point de vue économique, social, politique et militaire. À cet égard, et quoi que l'on puisse en penser, la disposition par l'Irak, comme c'est le cas pour Israël, de l'arme nucléaire était un facteur clé pour que l'Irak (et, bien sûr, en conséquence, Saddam Hussein lui-même) soit reconnue, par les États arabes comme par l'opinion publique arabe, comme le leader incontesté du monde arabe, après que le projet de République arabe unie eut fait long feu. Il n'est d'ailleurs pas impossible que la volonté des États-Unis de s'opposer à ce que l'Irak, qui y travaillait activement, possède l'arme nucléaire ait été la cause principale du déclenchement de la guerre du Golfe de 1991.
Après que l'Égypte eut renoncée, avec l'arrivée au pouvoir de Mohammed Hosni Moubarak, à jouer ce rôle, l'Irak baasiste a essayé de reprendre le flambeau, et Saddam Hussein a certainement rêvé d'être celui que l'Histoire du monde arabe retiendrait pour les siècles à venir comme ayant été l'artisan de la « Renaissance arabe ». Il revendiquait un destin prestigieux pour l'Irak, voulant faire de son pays un État fort, première puissance militaire et technologique de la grande « Nation arabe », au besoin par le fer et par le feu.
L'Irak bénéficie alors d'un large soutien international et des pays comme la France et les États-Unis (qui espéraient affaiblir le régime islamiste iranien et ainsi favoriser sa chute) lui fournissent en grande quantité armes et technologies, l'URSS restant toutefois le premier fournisseur d'armement. Le Raïs, qui se prend pour le nouveau Saladin et qui rêve de prendre la tête du monde arabe par la conquête militaire, est sacré champion de l'Occident. Les Nations unies n'ont jamais enquêté sur les crimes de Saddam Hussein car il était impossible de violer les principes de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un État. Aucune aide internationale ne vint soutenir les victimes kurdes des gazages et de la politique d'extermination.
Les crimes de Saddam hussein (Attention : images choquantes!)