Jacques Mesrine : l'ennemi public n°1

Jacques René Mesrine (né le 28 décembre 1936 à Clichy-La-Garenne, abattu par la police le 2 novembre 1979 à Paris) fut un gangster et un meurtrier français, membre de l'O.A.S., ayant opéré principalement en France mais aussi au Canada et un peu en Espagne. Il a été surnommé « l'homme aux mille visages » ou à tort, de son propre aveu, « le Robin des Bois français ». Déclaré « ennemi public n° 1 » au début des années 1970, il est notamment connu, en France, pour des braquages médiatisés et pour ses évasions.


Jeunesse et la guerre d'Algérie


Fils de commerçants aisés, c'est à Clichy-La-Garenne (au 5 de l'avenue Anatole-France) qu'il grandit et qu'il se met à fréquenter le quartier populaire de Pigalle de la capitale. Ses parents souhaitent le voir intégrer l'école des Hautes Études Commerciales (HEC). Mais il n'aime pas l'école. Il est expulsé par les frères oratoriens et effectue le reste de sa scolarité au collège-lycée de Juilly. Il en est renvoyé à cause de violences exercées envers le proviseur. Il devient alors représentant en tissus.
Il est brièvement marié de juillet 1955 à 1956 avec Lydia de Souza. Il n'a alors que 19 ans. Il s'engage dans la guerre d'Algérie comme parachutiste-commando où il est amené à se comporter cruellement. C'est durant celle-ci que Mesrine prend un pistolet 45 ACP sur l'une de ses victimes et le rapporte en France. Il l'aura constamment sur lui. Jacques Mesrine sera décoré par le général De Gaulle de la Croix de la valeur militaire. Il revient en France en mars 1959, après avoir reçu un certificat de bonne conduite de la part de la 626ème compagnie. D'après ses proches, l'expérience de l'Algérie l'a profondément marqué.

Premiers faits d'arme en France

Il participe à de nombreux cambriolages dès l'âge de 23 ans avec son ami de toujours Tony Ferreira. Il tue un proxénète magrébin. Le 4 novembre 1961, il se marie avec Maria de la Soledad à la mairie du 18e arrondissement de Paris. C'est à cette époque qu'il est arrêté et condamné, pour la première fois, à payer une amende pour port d'armes prohibées.
Le 2 janvier 1962, il est arrêté au Neubourg, à coté de Louviers où ses parents avaient une maison de campagne, alors qu'il tentait, avec 3 complices, de braquer le Crédit Agricole.
Il est condamné, pour la première fois, à 18 mois de prison en mars 1962. Il passera son temps d'incarcération dans les prisons d'Évreux, puis d'Orléans. Il est relâché en 1963. Il souhaite alors quitter la vie criminelle et trouve un emploi dans une entreprise d'architecture d'intérieur. Mais il perd son travail suite au chômage technique de celle-ci et il redevient, de fait, criminel.

Les Îles Canaries, le Canada et le Venezuela

Le 2 décembre 1965, il est arrêté à Palma de Majorque en train de voler des documents politiques dans le bureaux du gouverneur militaire. La police locale le soupçonne de travailler pour les services secrets français. Il est condamné à six mois de prison.
En octobre 1966, il ouvre un restaurant à Santa Cruz de Tenerife dans les Îles Canaries. Parallèlement il continue son activité criminelle. En décembre 1966, il attaque une bijouterie à Genève en Suisse. En mai 1967, il ouvre une auberge à Compiègne, en France. Le 15 novembre 1967, il cambriole un hôtel à Chamonix. Le 8 décembre, il braque une maison de haute couture parisienne. Maria de la Soledad le quitte et leurs trois enfants, Sabrina, Bruno et Boris, sont confiés aux parents de Mesrine.
Le 6 février 1968, il s'enfuit au Canada avec Jeanne Schneider, maîtresse rencontrée après son divorce. Cette dernière était une call-girl, dont les souteneurs ont été abattus par Mesrine, selon ses dires. En juillet 1968, les deux arrivent sur Montréal. Le couple rentre au service d'un milliardaire handicapé, Georges Deslauriers, qu'il enlève le 12 janvier 1969, après avoir été renvoyé et demande une rançon de 200 000$ à son frère. Mais ce dernier réussit à s'échapper. Dès lors, Mesrine se lance dans la grande criminalité. Le 26 juin 1969, le couple Mesrine-Schneider quitte le motel des trois sœurs à Percé où ils s'étaient réfugié et franchit illégalement la frontière des États-Unis. Le 30 juin, le corps étranglé d'Évelyne Le Bouthilier est découvert dans sa résidence à Percé. En fuite aux États-Unis, Mesrine est arrêté à Texarkana, dans l'Arkansas, et extradé vers le Canada. A sa sortie d'avion, il fanfaronne devant les journalistes et déclare en reprenant une citation du Général de Gaule : "Vive le Québec libre !". Accusé de meurtre et de kidnapping, Mesrine se retrouve à la une des journaux québécois.
Il est déclaré ennemi public N° 1.
Le 17 août 1969, Mesrine et Schneider s'évadent de la prison de Percé, mais ils sont repris le lendemain. Toujours en août 1969, ils sont condamnés respectivement à 15 et 10 ans de prison pour le rapt de Georges Deslauriers. En janvier 1971, Mesrine et Schneider sont acquittés pour le meurtre de Le Bouthilier. Mais cette accusation d'un meurtre qu'il n'avait pas commis fut pour Mesrine une injustice profonde. Ce sera un des thèmes principaux de son deuxième livre : Coupable d'être innocent, écrit en 1979.
Le 21 août 1972, il s'évade de la prison de St-Vincent-de-Paul avec 5 autres détenus dont notamment Jean-Paul Mercier. Leurs cavales sont émaillées de nombreux méfaits. Le 26 août, ensemble, ils braquent la caisse populaire de Saint-Bernard à Dorchester, puis 10 minutes plus tard, ils font de même avec celle de Saint-Narcisse de Lotbinière, soit deux le même jour. Leur butin s'élève à 26 000 $. Le 28 août, ils braquent la Toronto Dominion Bank à Montréal. Ils la braquent à nouveau trois jours plus tard.


Le 3 septembre, ils échouent dans leur tentative de libérer trois prisonniers de la prison de St-Vincent-de-Paul, celle où ils se trouvaient prisonniers, mais ils blessent grièvement deux policiers. Une semaine plus tard, pendant qu'ils s'exercent au tir, ils tuent deux gardes-chasses en compagnie de Jean-Paul Mercier, près de Saint Louis Blandford au Canada.
En octobre, après d'autres braquages à Montréal, ils effectuent un court passage à New-York, au palace du Waldorf-Astoria. Puis d'octobre à novembre 1972, il s'enfuit au Venezuela avec Jean-Paul Mercier et deux maîtresses. Plus tard, Mercier les quittera pour revenir au Canada.

Retour en France: l'ennemi public n° 1

Il retourne en France en décembre, où il commet le braquage de la paie d'une usine de Mantes-la-Jolie pour un montant de 320 000 F et d'une caissière retirant 280 000 F d'une banque. Le 5 mars 1973, lors d'une altercation avec une caissière d'un café-bar, Mesrine brandit un revolver. Un policier tente d'intervenir et ce dernier se retrouve grièvement blessé. Trois jours plus tard, Mesrine est arrêté à Boulogne-Billancourt. En mai, il est condamné en France à 20 ans de prison.
Le 6 juin, il doit comparaître pour une petite affaire de chèques sans provisions, mais il s'évade du tribunal de Compiègne en prenant en otage le président du tribunal, grâce à une arme dissimulée dans les toilettes par un complice, Michel Ardouin dit "le Porte-Avion". Le 21 juin, il attaque à main armée l'imprimerie Lang pour s'emparer de la paie des employés, rue Curial dans le XIXème arrondissement de Paris, environ 1,5 millions de francs.
Petit intermède dans sa folle activité, il s'offre quelques vacances de juillet à août dans une station balnéaire de la côte normande, Trouville. Mais début août, il reprend ses activités en s'attaquant au Crédit Lyonnais de l'avenue Bosquet dans le VIIème arrondissement de Paris. Après ce coup retentissant, il se tient tranquille deux mois. Mais le 27 septembre, il braque deux banques coup sur coup.
Il est arrêté par le commissaire Robert Broussard une première fois le 28 septembre 1973, à son appartement rue Vergniaud dans le 13e arrondissement de Paris. Cette arrestation restera célèbre puisque le truand ouvrit la porte aux policiers (après vingt minutes de négociations à travers la porte), cigare aux lèvres et offrit le champagne au commissaire (Mesrine à Broussard : « Tu ne trouves pas que c'est une arrestation qui a de la gueule ? »).
C'est durant ce séjour en prison qu'il écrit son autobiographie L'instinct de mort, qui paraîtra en février 1977. Dans ce livre, il déclare avoir tué 39 personnes, ce qui reste peu plausible. Le 19 mai 1977, Mesrine est condamné à 20 ans de prison pour attaques à main armée, recel et port d'armes par la juge Petit. Durant ce procès, il se produit une anecdote célèbre : il lance les clefs de ses menottes à la figure des juges pour prouver la corruption de la police et de la justice. Il est transféré au quartier de haute sécurité de la prison de la Santé. Son incarcération au QHS de la prison de la Santé est à l'origine d'un combat médiatique qu'il entend mener afin de les faire supprimer, décrivant les conditions de détention qu'il juge dégradantes. Il y rencontre Charlie Bauer, un révolutionnaire d'ultra gauche, qui devient son bras droit. Il parvient néanmoins à s'évader le 8 mai 1978, accompagné de François Besse et de Carman Rives (ce dernier est tué lors de l'évasion). Les conditions de son évasion restent à ce jour non élucidées. Peu de temps aprés son évasion, Mesrine est identifié sur les lieux d'un braquage d'une armurerie parisienne.
Le 26 mai 1978, il braque le casino de Deauville avec son compagnon de cavale, François Besse. Le braquage tourne mal, faisant deux blessés, mais les deux évadés parviennent à s'enfuir. C'est à cette période, qu'il se met à écrire son deuxième livre le plus politique, « Coupable d'être innocent », qui paraîtra après sa mort en 1980. Il continue les braquages (comme celui de la Société générale du Raincy le 30 juin 1978) tandis que la police poursuit ses efforts pour le localiser. La police craint le pire. Il est noté que Mesrine opérait toujours sans violences, une des marques de Mesrine était de ne jamais tuer "inutilement" et d'exécuter ses méfaits très rapidement.
Deux jours plus tard, une vaste opération est déclenchée pour tenter de retrouver Besse et Mesrine. Plus de 300 gendarmes, ainsi qu'une section du GIGN assistée de policiers de la brigade de l'anti-gang sont déployés pour les rechercher, en vain... Mesrine nargue les autorités en donnant des entretiens à des journalistes. Ainsi à Paris Match, le 4 août 1978, Isabelle Peltier reçoit ses déclarations. Il se montre menaçant envers quiconque voudrait tenter de l'arrêter. Il veut abolir les QHS (Quartiers de haute sécurité) et va jusqu'à menacer Alain Peyrefitte, ministre de la Justice de l'époque. Sa notoriété entraîne une guerre des polices entre Lucien Aimé-Blanc chef de l'OCRB et Robert Broussard chef de l'antigang, pour l'arrêter. Le 10 novembre 1978, il essaie d'enlever le juge Petit, président de la cour d'assises de Paris à l'époque, qui l'avait condamné à 20 ans de prison en 1977. Il n'y parvient pas, le fils aîné du juge parvenant à prévenir les autorités. Mesrine parvient à s'enfuir. Le 21 juin 1979, il enlève le milliardaire Henri Lelièvre avec la complicité du braqueur Michel Schayewski et obtient une rançon de 6 million de francs.
Dés lors, il devient l'ennemi public n°1 en France. En août, une unité anti-mesrine est créée.
Le 10 septembre 1979, Mesrine tend un guet-apens au journaliste de Minute dans la forêt de Fontainebleau, Jacques Tillier, le torture, le blesse grièvement par 3 balles en lui tirant dans la joue, le bras et la jambe . Il le laisse pour mort. Mesrine reprochait à ce journaliste de l'avoir diffamé en écrivant qu'il n'était pas une personne « réglo » avec ses associés en août 1979.

Documentaire Mesrine



La mort de Mesrine

Fin octobre 1979, les hommes du commissaire divisionnaire Lucien Aimé-Blanc, chef de l'Office central pour la répression du banditisme (OCRB) repèrent l'appartement de Mesrine rue Belliard, dans le 18e arrondissement de Paris. Ceci est rendu possible par le biais d'un indicateur qui "balance" Charlie Bauer comme complice actif de Mesrine. Maurice Bouvier, alors directeur central de la police judiciaire, saisit la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) du commissaire principal Robert Broussard, territorialement compétente pour procéder à l'arrestation de Jacques Mesrine. Le vendredi 2 novembre 1979 à 15h15, Mesrine, au volant de sa voiture avec sa compagne Sylvia Jeanjacquot, est encerclé par les hommes de la BRI, porte de Clignancourt, à Paris. Un camion bâché, qui s'est inséré devant son véhicule, dissimule des tireurs qui ouvrent le feu sur lui et sa compagne. Vingt-et-une balles sont tirées. On retrouvera dix-huit impacts de balles à haute vélocité sur son corps. Il est tué en possession de grenades et d'armes de poing. Sa compagne, grièvement blessée, perd un œil dans la fusillade.
La mort de Mesrine est un premier cas de remise en cause de la légitime défense vis-à-vis de la police, qui aurait ouvert le feu sans sommation. Deux nouveaux témoins ont apporté des éclaircissements en octobre 2008 sur France Inter, Guy Peynet qui était en 1979 le patron du bar "Le Terminus", porte de Clignancourt, n’a jamais été entendu sur procès-verbal dans la procédure judiciaire (il a envoyé une lettre, jointe au dossier). Il affirme que les policiers n’ont pas effectué de sommations avant de tirer sur Mesrine. Tout ce qu’il a entendu c’est une rafale de coups de feu suivie du cri : « Bouge pas ! T’es fait ! ». Geneviève Adrey ne s’est jamais exprimée publiquement depuis ce fameux 2 novembre 1979. Ce jour là, celle qui était étudiante en musicologie, se trouve dans une cabine téléphonique, avec une amie, porte de Clignancourt, à quelques mètres de la voiture de Jacques Mesrine. Elle raconte avoir entendu des rafales de mitraillette ou en tout de cas des coups de feu très rapprochés, mais en aucun cas des sommations.

On rappelle toutefois à cette occasion un avertissement de Mesrine à Broussard : « Quand nous nous rencontrerons à nouveau, ce sera à celui qui tirera le premier. De plus, les policiers ont témoigné qu'au lieu de se rendre et de lever les mains, il eut un mouvement latéral comme si il allait se saisir de quelque chose. Après coup, on constatera la présence de deux grenades et de pistolets automatiques dans un sac à ses pieds... Et comme il dira sur une cassette posthume, retrouvé par les enquêteurs à destination de sa dernière compagne, Sylvie Jeanjacquot : « Si tu écoutes cette cassette, c'est que je suis dans une cellule dont on ne s'évade pas ».
L'instruction est rouverte en mars 2000. Elle débouche sur un non-lieu, le 14 octobre 2004. Le 6 octobre 2006, la Cour de cassation française a déclaré irrecevable le pourvoi en cassation de la famille Mesrine suite au non-lieu prononcé le 1er décembre 2005 par la chambre d'instruction de la Cour d'Appel de Paris.
Il est enterré au cimetière Nord de Clichy-La-Garenne, la ville qui le vit naître.
La BMW 528i vert métallisé de Jacques Mesrine est restée avec les scellés de justice 28 ans dans une fourrière à Bonneuil-sur-Marne avant d'être broyée dans une casse d'Athis-Mons le 14 mai 2007.

MESRINE - Film d'André Génovès (1983) avec Nicolas Silberg
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